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D’une France rurale à une France urbaine : les conséquences de l’exode rural

Au milieu du XIXe siècle, la population française est très majoritairement rurale : 26,4 millions de personnes (soit 75,6 % de la population) vivent dans des espaces ruraux et 8,5 millions (soit 24,4 % de la population) dans des espaces urbains. Dans la quasi-totalité des départements, la majorité de la population est rurale, à l’exception de la Seine (4,6 %), des Bouches-du-Rhône (27,1 %), du Rhône (48,7 %) et du Var (49,3 %).
À partir de 1846, date à laquelle la Statistique générale de la France (SGF) commence à indiquer le nombre d’habitants dans les espaces urbains et ruraux dans ses recensements, on observe une diminution continue de la part de la population rurale, qui se poursuit au cours du XXe siècle. Ce phénomène, qualifié « d’exode rural », s’explique par les crises successives qui ont touché le secteur agricole au cours du XIXe siècle, notamment la crise de 1846-1847 provoquée par des aléas climatiques, et l’épidémie de phylloxéra qui touche le secteur viticole à la fin du XIXe siècle. Par ailleurs, le déclin de l’artisanat rural1, l’évolution des techniques agricoles et le développement de l’industrie dans les villes — secteur qui offre généralement des salaires plus élevés — ont contribué à l’amplification des départs vers les espaces urbains2. À cela s’ajoutent également des raisons sociologiques3 : un moindre intérêt pour le travail agricole du fait de sa pénibilité, des conditions de vie moins confortables qu’en ville, une crainte du célibat suscitée par le départ des jeunes femmes vers les villes, le souhait de ne plus cohabiter avec les parents et un désir d’ascension sociale4. La mécanisation de l’agriculture a également entraîné une baisse de la main-d’œuvre nécessaire pour le travail agricole. Entre 1851 et 1891, la population active dans le secteur agricole a ainsi diminué de plus de moitié, passant de 14,3 millions à 6,5 millions d’actifs (-54,5 %). Ces chiffres sont toutefois à considérer avec précaution, car la population active agricole aurait largement été sous-estimée dans les recensements de la fin du XIXe siècle, probablement du fait d’une instabilité de la définition des actifs agricoles5. Concomitamment, l’émergence du chemin de fer a pu contribuer à faciliter la mobilité de la population sur le territoire, mais son importance dans la croissance démographique des villes ne doit pas être exagérée6.